Une mobilisation sociale sans précédent
Le jeudi 25 septembre 2025, Antananarivo a connu l’une des journées les plus tendues de son histoire récente. Dès l’aube, la capitale malgache s’est réveillée sous haute surveillance policière. Étudiants, jeunes travailleurs et membres de la Génération Z s’étaient donné rendez-vous pour protester contre les coupures chroniques d’eau et d’électricité, qui rythment le quotidien des habitants malgré le paiement mensuel des factures.
Les slogans brandis traduisaient un ras-le-bol général :
👉 « On veut vivre, pas survivre »
👉 « Rendez-nous l’eau et l’électricité »
Pour beaucoup, ces interruptions répétées des services essentiels sont devenues le symbole d’un gouvernement incapable de répondre aux besoins de base de sa population.
Répression musclée et tensions accrues
Dès la matinée, les forces de l’ordre avaient quadrillé les zones stratégiques, notamment la place d’Ambohijatovo, empêchant tout grand rassemblement. Face aux manifestants pacifiques, les policiers ont déployé grenades lacrymogènes, balles en caoutchouc, et même tirs à balles réelles, ce qui a choqué l’opinion publique.
Des enfants sortant de l’école ont été pris pour cibles collatérales, poussant plusieurs établissements scolaires à interrompre leurs cours. La Croix-Rouge a pris en charge de nombreux blessés. Parmi les interpellés figuraient des étudiants, des influenceurs et même un député engagé auprès des manifestants.
Quand la nuit tombe : chaos et pillages
Alors que les cortèges pacifiques se dispersaient, la situation a basculé en début de soirée. Dans plusieurs quartiers stratégiques — Ambodivona, 67ha, Talatamaty, Ankadindramamy, Ivato — des groupes opportunistes, sans lien direct avec les manifestants initiaux, ont profité du vide sécuritaire pour semer le chaos.
Supermarchés, galeries commerciales, petites boutiques et enseignes emblématiques comme le Tana Water Front, Super U, Cosmos, ABC Ivandry ou encore Pizza Pietra Analakely ont été pillés et incendiés. Des résidences privées, dont celles de personnalités politiques comme la sénatrice Lalatiana Rakotondrazafy et le député Naivo Raholdina, ont également été ciblées par des incendies volontaires.
La quasi-disparition des forces de l’ordre dans certains quartiers a renforcé l’impression d’un abandon total de la population face aux violences.
Le couvre-feu décrété
Face à l’ampleur des destructions, les autorités ont imposé un couvre-feu strict de 19 h à 5 h du matin. Une mesure exceptionnelle destinée à tenter de rétablir l’ordre, mais qui souligne surtout l’incapacité de l’État à anticiper et contrôler la situation.
Pour les commerçants, les pertes sont immenses. Certains petits entrepreneurs affirment avoir « perdu le travail d’une vie en une seule nuit ». Beaucoup redoutent désormais la faillite, faute de moyens pour se relever.
Une crise sociale et politique profonde
Cette nuit du 25 septembre symbolise bien plus qu’une révolte contre les coupures d’eau et d’électricité. Elle révèle :
- la colère d’une jeunesse frustrée et déterminée à faire entendre sa voix,
- la détresse des commerçants, premiers impactés par l’absence de sécurité,
- les failles criantes de l’appareil sécuritaire, accusé d’avoir laissé le chaos s’installer,
- et un climat de méfiance généralisée vis-à-vis des autorités politiques.
Le drapeau pirate One Piece brandi par certains jeunes durant la mobilisation restera sans doute comme une image marquante : celle d’une génération qui cherche à incarner le changement et refuse de se résigner à l’échec des institutions.
👉 Antananarivo sort meurtrie de cette journée de violences, mais les interrogations demeurent : qui sont les acteurs de ces pillages ? Pourquoi l’État a-t-il semblé absent au moment critique ? Et surtout, comment rétablir la confiance entre la population et ses dirigeants ?
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