Alors que l’île bat son record de fréquentation, le secteur touristique fait face à une crise paradoxale : les visiteurs affluent, mais les recettes plongent, mettant en lumière les tensions économiques et un modèle vulnérable.
L’Île de La Réunion a accueilli 556 534 touristes étrangers en 2024, soit un nouveau record acquis malgré un démarrage tardif causé par le cyclone Belal . Mais sous cette façade rassurante, les données révèlent un paradoxe :Recettes touristiques : en baisse de 1,9 % à 468,8 M€ . Dépenses touristiques : les visiteurs, notamment métropolitains, se montrent plus prudents, réduisant leur budget loisirs, restos et hébergement . Ainsi, plus de visiteurs, mais moins de revenus, signe d’une crise économique latente.
En 2024, le taux d’occupation hôtelier a chuté, avec une baisse de 4 % du nombre de nuitées par rapport aux niveaux pré-COVID-19 . La situation est encore plus nette à l’Ouest où l’offre croissante a suivi une demande en baisse (-10 %) .
Le tourisme local se contracte fortement : entre janvier et février 2025, les Réunionnais ont réduit leurs séjours sur l’île de 33 % et les nuitées marchandisées ont chuté de **51,6 %** . Ce double affaiblissement (visiteurs et locaux) fragilise les acteurs hôteliers et de loisirs.
Le secteur souffre aussi des moindres capacités aériennes : près de 27 000 sièges supprimés sur les liaisons métropole-Réunion au premier trimestre 2024, entraînant une hausse des billets d’avion . Air Austral, en difficulté, pourrait mettre la destination en péril si elle venait à réduire son offre.
Pour redresser la barre, le Comité Réunionnais du Tourisme (CRT) met en place des plans de relance ciblés : Campagnes de communication locale pour encourager les séjours insulaires . Promotion nationale et internationale pour diversifier la clientèle, notamment en Europe et en Afrique du Sud . Ateliers de crise et stratégie de résilience, afin de préparer l’île à toute nouvelle crise sanitaire ou climatique .
La situation révèle aussi une crise structurelle : forte dépendance au client métropolitain, budget restreint des touristes, volatilité du marché local, fragilité de la chaîne hôtelière et aérienne.
Comme le souligne la Cour des Comptes, l’île doit repenser ses politiques touristiques en gagnant en cohérence, en innovation et en attractivité .
La Réunion doit aujourd’hui transformer ces signaux de crise en opportunités : diversification des clientèles, montée en gamme, investissements ciblés dans l’offre et promotion renouvelée. Une relance durable passera par une vision claire, une politique de résilience et une stratégie cohérente entre tous les acteurs du tourisme.