La question hante beaucoup de jeunes Réunionnais : faut-il quitter l’île pour accéder à de meilleures études, à l’emploi, à une vie plus stable ? Ou bien vaut-il mieux rester pour construire chez soi, même si les obstacles sont nombreux ?
Le départ : un choix presque imposé
- D’après l’Insee, environ 30 000 jeunes natifs de La Réunion résidaient en métropole en 2013. Parmi eux, beaucoup sont partis pour les études supérieures, soit environ 12 200.
- Les jeunes Réunionnais partis montrent souvent une insertion professionnelle plus facile une fois diplômés, comparé à ceux qui restent.
- Un autre facteur déterminant : l’offre de formation locale reste limitée dans certaines filières, ce qui pousse au départ. Cela crée une « injonction à la mobilité » pour ceux qui visent des formations ou des métiers peu ou pas proposés sur l’île.
Le retour : espéré mais complexe
- Le retour n’est pas un simple retour. Beaucoup de Réunionnais revenus métropolitains évoquent la difficulté de retrouver un emploi qualifié à niveau équivalent. Les expériences accumulées en métropole ne sont pas toujours valorisées localement.
- L’association « Réunionnais de retour au Péi » joue un rôle organisateur et de soutien pour ceux qui rentrent : accompagnement, réseau, mise en relation avec des employeurs, etc.
Les défis qui rendent le choix difficile
- Emploi local limité
Malgré un diplôme élevé, l’emploi dans certaines filières est rare. La petite taille du marché local, la concentration des secteurs, et parfois la préférence pour les profils ayant une expérience métropolitaine, compliquent la donne. - Coût de la vie élevé et coût du retour
Le retour implique souvent des frais de mobilité, logement, et parfois des compromis sur le salaire. Pour ceux établis en métropole, quitter des salaires plus élevés pour un emploi local souvent moins bien rémunéré est une décision lourde. Témoignages en ligne soulignent ces dilemmes. - Ancrage affectif, familial, culturel
Beaucoup expriment un lien fort avec La Réunion : famille, climat, culture, nature. Ce sentiment joue un rôle clé dans les décisions, que ce soit pour rester ou revenir. Mais ce lien est parfois mis à l’épreuve par les difficultés structurelles. - Formation locale vs mobilité
Si l’offre de formation s’est améliorée, elle reste insuffisante dans certaines branches (ingénierie, recherche, spécialisations pointues). Cela oblige des jeunes à partir tôt, avec le risque de ne jamais revenir.
Des opportunités pour rester chez soi et contribuer
Malgré ces défis, des pistes existent pour permettre à ceux qui restent ou reviennent de construire un avenir local :
- Associations de retour : « Réunionnais de retour au Péi » aide à structurer un retour utile, valorise les compétences acquises ailleurs.
- Formations professionnelles adaptées : le RSMA-R (Régiment du Service Militaire Adapté de La Réunion) offre des métiers adaptés aux besoins locaux, un bon tremplin.
- Mobilité temporaire : partir pour étudier, mais revenir avec un projet clair, un emploi ou une activité locale viable. Ce “aller-retour” devient un modèle envisageable.
- Renforcement des infrastructures locales : universités, laboratoires, entreprises locales dans des secteurs de pointe pour retenir les talents.
Le dilemme « partir pour réussir ou rester pour construire » n’a pas de réponse universelle. Il dépend du domaine d’étude, des aspirations personnelles, du contexte familial et des opportunités locales.
Mais ce qui ressort clairement : le départ n’exonère pas les responsabilités locales. La Réunion peut devenir un territoire d’opportunité pour sa jeunesse, à condition de valoriser le retour, d’adapter les formations, de créer des emplois qualifiés et de reconnaître les compétences acquises ailleurs.
L’avenir se construit, qu’on soit ici ou là-bas — choisir de revenir doit être possible sans compromis sur ses rêves ni sur sa dignité.
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