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Dans son dernier clip, Maloyab dénonce le Bouclier Qualité Prix en vigueur à La Réunion.

Dans BQP Vie Chère, Maloyab critique frontalement les effets du dispositif encadrant les prix à La Réunion, et pointe les dérives économiques d’un système jugé inégalitaire.

Un séga sec, un visuel épuré, et un message sans ambiguïté : Maloyab signe, avec le clip BQP Vie Chère, une charge frontale contre la vie chère à La Réunion. En quelques minutes, cette œuvre hybride, entre séga militant et manifeste populaire, met en cause le modèle économique de l’île, et questionne l’efficacité du Bouclier Qualité Prix (BQP), un dispositif mis en place depuis 2013 pour contenir les prix de certains produits de première nécessité dans les Outre-mer.

Au cœur du propos : le décalage entre l’intention affichée de protéger les plus modestes et la réalité vécue par les consommateurs réunionnais.

Une dénonciation de l’« alimentation sous contrainte »

Dans le clip, les auteurs s’en prennent directement au BQP, qualifié de « forme de discrimination par l’alimentation ». Le dispositif, qui plafonne les prix d’un panier de produits de consommation courante, serait, selon eux, à double tranchant : loin de garantir l’accès à des produits de qualité, il réduirait la liberté de choix des ménages à faibles revenus, contraints de consommer une offre limitée, accusée d’être souvent de moindre qualité.

« Bouclier qualité, qualité pas quelle qualité », scande le refrain. Les paroles dénoncent des produits jugés trop gras, trop salés, et établissent un lien entre cette alimentation standardisée et les problèmes de santé publique qui touchent l’île, notamment le diabète et le cholestérol. Le clip suggère une fracture sociale : pendant que certains « mangent ce qu’ils veulent », d’autres n’ont d’autre choix que de « rabattre à lu produit le bquipé ».

Monopoles, liberté des prix et fausse concurrence

Mais la critique ne s’arrête pas au BQP. Le clip s’attaque aussi à la structure du marché réunionnais, qu’il qualifie de « captif ». Dans leur viseur, la liberté des prix : à La Réunion, les entreprises sont libres de fixer les tarifs des produits qu’elles importent, souvent avec des marges très élevées. Cette situation est d’autant plus préoccupante qu’elle s’inscrit dans un paysage économique marqué par la concentration : selon le clip, « un seul groupe a quasiment tout le marché ».

Le texte dépeint des acteurs économiques assimilés à des « requins », qui affichent des allures de philanthropes mais profiteraient d’un système opaque pour maximiser leurs bénéfices. Une métaphore animale renforce cette critique : celle du « Géographus Cry », un crabe charognard décrit comme se nourrissant de matière en décomposition. Pour Maloyab, ce crustacé incarne les profiteurs d’un système qui se nourrit des maux sociaux.

Une charge politique contre l’État et les élites économiques

Le clip adopte également une dimension politique assumée. Le gouvernement français est accusé d’avoir laissé se désindustrialiser l’économie réunionnaise, en fermant des usines et en favorisant l’installation de groupes extérieurs. Il serait ainsi co-responsable de la dépendance économique de l’île et de sa vulnérabilité aux fluctuations des prix mondiaux.

Le contraste entre les aides spécifiques à certains fonctionnaires – notamment la « prime de vie chère » à 53 % – et la précarité d’une partie de la population, est mis en exergue pour souligner les inégalités structurelles persistantes.

Entre appel à l’action et propositions concrètes

Loin de se limiter à la dénonciation, BQP Vie Chère se veut également force de proposition. Le clip appelle au boycott des enseignes dominantes et à la relocalisation de l’économie, en incitant la population à consommer local, à favoriser les petits producteurs, et à « prendre son pi pour développer l’économie proximité ».

Mais la principale revendication concerne l’encadrement légal des marges : Maloyab plaide pour un plafonnement des marges commerciales par catégorie de produit, et exhorte les députés à porter cette proposition au niveau national.

Un manifeste musical ancré dans une colère sociale

À travers BQP Vie Chère, Maloyab s’inscrit dans une tradition musicale réunionnaise engagée, dans la lignée du maloya contestataire. Le clip témoigne d’une exaspération croissante face aux inégalités économiques sur l’île, mais aussi d’une volonté de mobiliser. En faisant le pari de l’art pour parler de pouvoir d’achat, les auteurs montrent que la question des prix est aussi une affaire de dignité et de justice.

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