À La Réunion, près de 5 % des élèves seraient victimes de harcèlement scolaire, un phénomène aux conséquences parfois dramatiques sur la santé mentale et la réussite scolaire. Face à ce fléau, plusieurs établissements de l’île ont décidé de ne plus rester spectateurs et de multiplier les actions de prévention, de sensibilisation et de prise en charge.
Un lycée récompensé pour l’engagement de ses élèves
À la Saline-les-Hauts, le lycée Vue Belle s’est récemment illustré au niveau académique. L’établissement a remporté le prix coup de cœur 2025 du concours “Non au harcèlement”, grâce à un clip vidéo et une chanson entièrement conçus par sept élèves ambassadeurs.
Pendant quatre mois, ces lycéens se sont investis sans moyens techniques importants, misant sur la créativité, l’engagement collectif et la force du message. Chacun a contribué selon ses compétences : écriture des paroles, composition musicale, chorégraphie, tournage et montage.
Pour Mahyrone Alcmeon, ancien élève impliqué dans le projet, cette participation avait une dimension personnelle :
« J’ai moi-même subi du harcèlement plus jeune. Je me sentais obligé de m’engager pour soutenir cette cause. »
Même volonté chez Léa Welmant, élève de terminale :
« C’est un sujet qui nous concerne tous. L’objectif était d’avoir un impact, au lycée mais aussi à l’extérieur. »
L’académie salue une mobilisation qui commence à porter ses fruits. Selon le recteur, les signalements diminuent progressivement, signe d’une prise de conscience croissante chez les élèves, les équipes éducatives et les familles.
Des ateliers pour soigner victimes et auteurs
À Sainte-Marie, au collège Levavasseur de Beauséjour, la lutte contre le harcèlement prend une autre forme. Lorsqu’une situation est détectée, élèves harcelés comme harceleurs peuvent être orientés vers des ateliers spécifiques, animés par Jean-Michel Houée, éducateur spécialisé.
Son approche repose sur des techniques issues de la programmation neuro-linguistique (PNL), visant à apaiser les traumatismes et à déconstruire les mécanismes de violence.
« Les images répétées, les insultes, les humiliations s’ancrent profondément dans le cerveau des enfants. Il faut les aider à s’en libérer », explique-t-il.
L’objectif n’est pas seulement de sanctionner, mais de comprendre l’origine de la violence. Selon l’éducateur, beaucoup de harceleurs ont eux-mêmes été victimes de violences, à l’école ou dans le cadre familial, et ont intégré ce comportement comme normal.
Donner la parole pour briser le silence
Dans l’établissement, des élèves ambassadeurs jouent également un rôle clé. Xavier, élève de quatrième, est l’un d’eux :
« J’écoute ceux qui ont peur de parler. Si c’est grave, je préviens le CPE ou la direction. »
En deux ans, une trentaine de jeunes sont passés par ces ateliers. Résultat : une amélioration notable du climat scolaire et des élèves qui retrouvent peu à peu confiance et sérénité.
« Ils reviennent au collège avec le sourire », constate la direction.
Un combat de longue haleine
Si les responsables éducatifs reconnaissent que le harcèlement – et le cyberharcèlement – ne disparaîtra jamais totalement, ces initiatives montrent qu’une prise en charge humaine, éducative et préventive peut limiter les dégâts et changer des trajectoires de vie.
Pour prolonger son action, Jean-Michel Houée a même publié un livre numérique destiné aux parents et enseignants, afin de leur transmettre des outils concrets pour accompagner les enfants.
À La Réunion, la lutte contre le harcèlement scolaire s’organise donc sur le terrain, portée par les élèves eux-mêmes, les équipes éducatives et des professionnels convaincus qu’il est possible d’agir, avant que le silence ne fasse trop de dégâts.
Source : la1ere.franceinfo.fr






















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