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Un nouvel accord pour sortir le transport routier de l’ornière

La Réunion, 12 juillet 2025 – Un tournant pour le transport routier de marchandises à La Réunion : le 11 juillet, une charte de bonnes pratiques a été signée à la préfecture, impliquant l’ensemble des acteurs concernés – État, collectivités, transporteurs, donneurs d’ordre et chambres consulaires .

Le transport routier de marchandises constitue une colonne vertébrale silencieuse de l’économie réunionnaise. En reliant les zones de production, les plateformes logistiques, les centres urbains et les chantiers d’infrastructure, il assure la fluidité d’une île aux contraintes géographiques uniques. Pourtant, ce secteur, vital et exigeant, traverse depuis plusieurs années une crise profonde et structurelle. Hausse des coûts, déséquilibres contractuels, fatigue sociale : les signaux d’alerte se multiplient. C’est dans ce contexte tendu que l’État, les collectivités, les transporteurs, les donneurs d’ordre et les chambres consulaires ont signé, le 11 juillet 2025, une charte inédite de bonnes pratiques, portée comme un acte fondateur d’un changement attendu.

Le transport routier, bien qu’indispensable, est devenu au fil des ans un secteur en souffrance. À La Réunion, l’isolement géographique rend toute interruption logistique immédiatement visible sur les rayons ou les chantiers. Pourtant, les transporteurs eux-mêmes sont à bout de souffle : coûts d’exploitation toujours plus élevés, marges réduites, pression sur les délais et sur les hommes. La situation est d’autant plus critique que le secteur peine à recruter et à valoriser ses métiers auprès des jeunes. En toile de fond, un sentiment d’injustice : celui de négociations déséquilibrées, dans lesquelles les petites entreprises de transport se retrouvent trop souvent prises en étau entre leurs coûts réels et les tarifs imposés par les donneurs d’ordre.

Face à ces dérives structurelles, la signature de cette charte de 26 engagements constitue un moment politique et symbolique fort. Pour la première fois depuis 2011, tous les acteurs du secteur s’engagent ensemble autour d’un même texte. L’objectif est double : redonner de la lisibilité économique au métier, en contractualisant davantage les relations commerciales, et renforcer les droits et moyens des transporteurs, en particulier face à la volatilité des prix (carburant, assurance, matériel).

La charte prévoit aussi des avancées concrètes sur la formation, l’innovation logistique, l’accès au foncier, ou encore la création d’aires de repos adaptées. Le préfet Patrice Latron a rappelé que ce texte « prépare la filière à faire face aux défis sociaux, économiques et environnementaux à venir ».

Pour autant, les acteurs du terrain restent prudents. Beaucoup rappellent que la charte de 2011, pourtant signée en grande pompe, n’a jamais été appliquée. Cette mémoire collective nourrit une forme de méfiance pragmatique, exprimée notamment par les syndicats de transporteurs. Jean-Gaël Rivière (FNTR) ou Michel Alamèle (FTR) alertent sur la fragilité des entreprises, parfois en perte de 40 % de marge, et insistent : sans mécanisme de révision automatique des prix, l’avenir du transport péi est incertain.

Ce nouvel accord ne résout pas la crise, mais il marque peut-être le début d’un changement de paradigme. Dans une économie insulaire où la logistique est à la fois fragile et essentielle, repenser le transport routier comme un partenaire stratégique et non comme un simple prestataire est une nécessité.

La charte 2025 ne réglera pas tout. Mais elle a le mérite de poser les fondations d’un dialogue refondé, plus transparent, plus équitable, et potentiellement plus résilient. Encore faut-il, maintenant, que la parole soit suivie d’actions, et que les partenaires s’y engagent durablement, au-delà des signatures et des symboles.

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